L’Info-droit
Reprise de logement et éviction
Au Québec, la Loi consacre, pour le locataire, le droit au maintien des lieux. En d’autres termes, il peut rester dans le logement tant et aussi longtemps qu’il respecte les conditions du bail. Néanmoins, le droit québécois prévoit certaines exceptions qui peuvent permettre à un propriétaire de reprendre son logement ou encore d’évincer un locataire.
Comme elles portent atteinte au droit du locataire au maintien dans les lieux, Ces procédures de reprise de logement ou d’éviction doivent être effectuées de bonne foi et suivant les étapes détaillées par la Loi. Sous peine de quoi, le Tribunal administratif du logement pourra les déclarer illégales.
La reprise de logement
Les responsabilités du locateur
Tout locateur peut effectuer une reprise de logement pour y loger exclusivement les personnes suivantes (art. 1957 C.c.Q.) :
- Lui-même ;
- Ses ascendants ;
- Ses descendants au premier degré ;
- Tout parent ou allié, dont il est le principal soutien ;
- Son ex-conjoint, dont il est le principal soutien ;
- Ou son conjoint actuel.
Pour que la reprise soit considérée comme légale, le locateur doit respecter diverses formalités :
(1) Tout d’abord, le locateur a l’obligation de donner un avis de reprise au moins six mois avant l’expiration du bail d’une durée de 12 mois (art. 1960 al. 1 C.c.Q.).
(2) Afin d’être valide, cet avis de reprise doit absolument indiquer (art. 1961 al. 1 C.c.Q.) :
- La date prévue pour la reprise
- Le nom du bénéficiaire de la reprise
- Le degré de parenté ou le lien du bénéficiaire avec le locateur.
Le locataire bénéficie alors d’un délai d’un mois suivant la réception de l’avis pour faire part au locateur de son acceptation ou de son refus. Il faut noter que le silence du locataire est interprété comme un refus de celui-ci de se conformer à l’avis de reprise (art. 1962 C.c.Q.).
(3) Un mois suivant le refus explicite ou le silence du locataire, le locateur peut intenter une action devant le Tribunal administratif du logement pour réclamer son autorisation afin de procéder à la reprise (art. 1963 C.c.Q.).
(4) Tout locateur qui souhaite relouer son logement suite à une reprise de logement doit préalablement obtenir une autorisation du tribunal à cet effet (art. 1970 C.c.Q.). Ainsi, le tribunal sera en mesure de fixer le loyer du logement pour s’assurer que celui-ci ne subit pas d’augmentation abusive (arrêt Brossard c. Brahimi). Dans la majorité des cas, le tribunal accordera l’autorisation de relocation au locateur. Or, dans quelques cas isolés, le tribunal pourra interdire la relocation de l’immeuble, s’il juge que la relocation de l’immeuble légitimerait une reprise de logement de mauvaise foi (arrêt Beauger c. Mohammed).
Il est impératif de souligner qu’un locateur ne peut imposer de reprise de logement dans les trois situations suivantes :
(1) Il est impossible pour tout locateur d’une part indivise d’un immeuble d’effectuer une reprise de logement, à moins que le seul autre propriétaire de l’immeuble soit son conjoint (art. 1958 C.c.Q.).
(2) Il est impossible pour tout locateur, dont le locataire (art. 1959.1 C.c.Q.) :
- Est âgé de 70 ans ou plus ;
- Occupe le logement depuis minimalement 10 ans ;
- Ou a un revenu égal ou inférieur au montant admissible à un logement à loyer modique .
(3) Il est impossible pour tout locateur d’effectuer une reprise de logement si ce dernier possède un autre logement vacant du même genre, dans les environs et d’un loyer équivalent au logement occupé par le locataire (art. 1964 C.c.Q.).
Les recours possibles pour les locataires
Tel que mentionné plus haut, toute reprise de logement doit être faite de bonne foi et suivant les procédures légales, puisqu’elle porte atteinte au droit au maintien des lieux du locataire (art. 6, 7 et 1375 C.c.Q.). De ce fait, toute reprise constituant une éviction déguisée est illégale et sanctionnable. C’est le cas par exemple, d’un locateur qui prétend reprendre un logement pour s’y loger, mais qui le met plutôt à vendre une fois le locataire évincé (arrêt Rocheleveque c. Sellam).
Pour tout locataire ayant subi une reprise de logement de mauvaise foi ou à l’encontre des procédures légales, il est possible de recouvrer des dommages-intérêts et des dommages-intérêts punitifs en entamant un recours devant le Tribunal administratif du logement. Cela est possible que le locataire ait consenti ou non à l’éviction (art. 1968 C.c.Q.).
L’éviction
Les responsabilités du locateur
Le locateur d’un logement peut procéder à une éviction pour les trois motifs suivants exclusivement (art. 1959 C.c.Q.) :
- Pour subdiviser le logement
- Pour agrandir le logement
- Ou pour changer l’affectation du logement
Pour que la reprise soit considérée comme légale, le locateur doit respecter diverses formalités :
(1) Tout d’abord, le locateur a l’obligation de donner un avis d’éviction au moins six mois avant l’expiration du bail d’une durée de 12 mois (art. 1960 al. 1 C.c.Q.).
(2) Afin d’être valide, cet avis d’éviction doit absolument indiquer (art. 1961 al. 2 C.c.Q.) :
- La date prévue pour l’éviction, soit la dernière journée du bail
- Le motif d’éviction
Le locataire bénéficie alors d’un délai d’un mois suivant la réception de l’avis pour faire part au locateur de son acceptation ou de son refus. Pour signifier son refus, le locataire doit intenter un recours devant le Tribunal administratif du logement dans le mois suivant la réception de l’avis d’éviction (art. 1966 al. 1 C.c.Q.). À l’inverse de la reprise de logement, le silence du locataire est ici interprété comme une acceptation de celui-ci de se conformer à l’avis de reprise (art. 1962 C.c.Q.).
(3) Le locateur est tenu de payer au locataire évincé une compensation pécuniaire de trois mois de loyer et des frais raisonnables de déménagement (art. 1965 al. 1 C.c.Q.).
Il est impératif de souligner qu’un locateur ne peut imposer de reprise de logement dans la situation suivante :
(1) Il est impossible pour tout locateur, dont le locataire (art. 1959.1 C.c.Q.) :
- Est âgé de 70 ans ou plus ;
- Occupe le logement depuis minimalement 10 ans ;
- Ou a un revenu égal ou inférieur au montant admissible à un logement à loyer modique.
Les recours possibles pour les locataires
Tel que mentionné plus, haut, le locataire qui veut s’opposer à une éviction bénéficie d’un délai d’un mois pour produire une opposition à l’éviction devant le Tribunal administratif du logement à cet effet (art. 1966 al. 1 C.c.Q.). Le locateur devra conséquemment démontrer sa bonne foi en prouvant que les motifs de l’éviction sont véridiques et légaux (art. 1966 al. 2 C.c.Q.).
Dans le cas où l’éviction est autorisée, le locateur doit verser au locataire évincé une compensation financière équivalant à 3 mois de loyer plus des frais raisonnables de déménagement. Toutefois, si le locataire juge qu’il n’a pas reçu une indemnité suffisante suite à son éviction, il peut introduire un recours devant le Tribunal administratif du logement pour que celui-ci fixe le montant des dommages-intérêts qui lui sont dus (art. 1965 al. 1 C.c.Q.).
Johan Sebastian VILLA